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Discours du chancelier fédéral Sebastian Kurz au Forum européen d'Alpbach
Discours du chancelier fédéral Sebastian Kurz au Forum européen d'Alpbach
BKA/Dragan Tatic

Discours du chancelier fédéral Sebastian Kurz lors du Forum européen d'Alpbach

Publié le 29 août 17:00

Discours du chancelier fédéral Sebastian Kurz au Forum européen d'Alpbach le 27 août 2018 (texte intégral)

Merci beaucoup, Mesdames et Messieurs, merci beaucoup Monsieur le Président, cher Franz Fischler, pour l'invitation et pour cette possibilité d'être une nouvelle fois à Alpbach.

On vient de me le faire remarquer: c'est vrai, j'y suis venu pour la première fois comme boursier, il y a plus de 10 ans. Cela fait maintenant plus de 10 ans que je reviens à Alpbach. Nous avons constaté juste avant, cher Franz, que j'y suis venu plus souvent que toi mais comme tu y fais toujours des séjours prolongés, tu y es resté au total pendant un plus grand nombre de jours. Cependant, après tellement d'années à Alpbach, j'y associe naturellement de nombreux souvenirs positifs.

Je suis heureux de pouvoir parler quelques minutes sans être contesté et me réjouis cependant d'autant plus de la discussion qui suivra puisque c'est de cela qu'il s'agit en fait. Comme de nombreux invités d'honneur sont présents, je ne voudrais pas les saluer tous nommément, mais Monsieur le Président fédéral, Monsieur le Vice-chancelier en retraite et, peut-être au nom de tous, Monsieur Ban Ki-Moon, c'est pour nous un grand honneur que vous soyez avec votre épouse à Alpbach, c'est toujours une joie de vous accueillir en Autriche. Je suis ravi que vous soyez là.

Franz Fischler l'a évoqué déjà lors de son introduction: nous avons eu l'honneur en tant que République de reprendre le 1er juillet le flambeau de la présidence du Conseil de l'Union européenne à une époque marquée, je dirais, par de grands défis à l'échelle mondiale, dans un environnement international très complexe. Nous voyons que les tensions que nous avons depuis quelques années avec la Russie ne sont toujours pas résolues. Nous voyons que la Chine se développe certes de manière très positive sur le plan économique et connaît une croissance impressionnante, mais que les valeurs sur laquelle le pays repose, l'image que donne la société et aussi celle que nous recevons de la démocratie et de l'État de droit sont bien loin des nôtres. Nous voyons aux États-Unis une imprévisibilité croissante ce qui est tout de même un changement lorsque l'on pense qu'ils ont été pour nous de tout temps un fort partenaire transatlantique. Nous vivons depuis la crise migratoire et avant, la crise financière, des tensions croissantes au sein de l'Union européenne et avec le Brexit, pour la première fois, un pays qui quitte volontairement l'Union européenne. Par conséquent, l'objectif peut-être le plus important pour notre présidence du Conseil devra être de tout faire pour garantir pour le moins qu'il y aura toujours après le Brexit de bonnes relations, une forte coopération entre l'UE à 27 et la Grande-Bretagne. Parce que toute autre chose aurait des inconvénients économiques mais aussi politiques massifs, non seulement pour la Grande-Bretagne mais aussi et surtout pour l'UE à 27.

Lorsque l'on observe toutes ces évolutions, notamment en Europe et c'est ce que j'ai ressenti parfois lorsque j'étais ministre des affaires étrangères, il semblerait presque que l'Union européenne soit livrée à tous ces développements qui se produisent en étant un peu sans défense. Trop lente dans le processus de prise de décision pour être compétitive à l'échelle internationale, en partie trop divisée pour trouver une ligne commune dans des questions pourtant décisives, trop faible parfois pour faire face aux grandes puissances en politique étrangère et pour être l'acteur au sens où nous aimerions qu'elle le soit.

Je crois cependant que face à tous les enjeux et aussi à la nécessité de développement de l'Union européenne, il est tout particulièrement décisif que nous tous ensemble n'oublions pas ce qu'est en fait l'Union européenne. À savoir le projet qui a conduit à la plus grande réussite du XXe siècle. Une réussite qui garantit à 500 millions de personnes d'une manière unique la paix, la liberté et au moins une prospérité modeste, qui apporte à l'échelle internationale et de loin les plus grandes contributions à l'aide au développement, à l'échelle internationale plus de la moitié de ce qui est versé dans le monde entier, pour améliorer les conditions de vie ailleurs, hors de l'Europe.

Et c'est surtout, justement pour nous, la jeune génération, un garant de l'existence du «European way of life» que nous connaissons et apprécions et qui est bien loin d'être une évidence dans d'autres régions du monde. Je crois que cela peut et devrait déclencher en chacun de nous une saine fierté européenne. Pas de vain orgueil et certainement pas de nationalisme, mais pourtant une saine fierté d'Européen. Et je crois que cette fierté devrait comporter une pointe de gratitude: vis-à-vis de la génération qui a bâti l'Union européenne mais aussi la conscience de la responsabilité qui nous incombe d'avoir à travailler chaque jour à la poursuite du développement de l'Union européenne dans un sens positif. Et je crois que si nous voulons développer l'Europe dans un sens positif, nous devons en tout premier lieu commencer par renforcer ses fondements, ce qui nous caractérise, ce qui donne une stabilité à l'Union européenne. Nous devons aussi corriger le cap toutes les fois que cela est nécessaire et je crois qu'il est temps de prendre des décisions courageuses.

Qu'est-ce que j'entends quand je dis: nous devons renforcer les fondements de l'Union européenne? Je crois que ce que représente l'Union européenne et la rend forte n'est pas la somme des subventions qui sont distribuées, n'est pas le nombre de fonctionnaires à Bruxelles, pas plus que forcément notre performance économique commune. Ce qui nous caractérise en tant qu'Union européenne, ce sont nos valeurs fondamentales: l'État de droit, la démocratie et la liberté.

Ceci constitue la base pour nous en Europe et aussi un domaine dans lequel il ne doit y avoir aucun compromis en présence de dérives. De plus, nos fondements font que nous pouvons vivre en paix, dans la sécurité et la stabilité, à savoir à un degré qui est en fait inimaginable dans quasiment toutes les autres régions de ce monde. Et pour pouvoir continuer à le garantir, il faut à notre avis renforcer la coopération dans le domaine de la politique de sécurité et de défense. Pas pour se mettre en travers de l'OTAN ou comme contre-modèle, mais parce que ce sera pour nous en Europe un fondement important permettant d'assurer la paix et la stabilité au long terme. Naturellement, il faut également une protection des frontières extérieures qui soit fonctionnelle. Car ce n'est que si nous protégeons nos frontières extérieures que nous pourrons garantir que l'Europe sans frontières intérieures, dans laquelle tous ceux qui ont mon âge ont grandi, reste une évidence à l'avenir.

Et je crois que si nous voulons renforcer notre fondement, et Franz Fischler l'a déjà évoqué, il sera aussi important de raviver souvent dans nos consciences la devise de l'Union européenne. La devise qui dit: «Unis dans la diversité» et non pas: «Séparés dans l'égalité». À mon avis cela veut dire que nous devons poursuivre avec détermination ce que Jean-Claude Juncker s'est proposé de faire au début de sa présidence et a tenté de vivre ces dernières années. À savoir, créer une Europe de la subsidiarité, se focaliser davantage sur les grands dossiers qui requièrent des réponses communes et autoriser en même temps que l'Union européenne s'efface dans les questions où les régions ou même les États membres peuvent décider seuls. Je crois que c'est seulement si nous vivons vraiment le principe de la subsidiarité que la diversité que nous connaissons et apprécions dans l'Union européenne continuera d'être notre force.

En plus de fondements forts, nous avons absolument besoin de procéder à des corrections de cap lorsque des dérives se sont produites. Et je crois, j'ai dû le vivre malheureusement en tant que ministre des affaires étrangères, que les dernières années ont de plus en plus conduit à creuser des fossés en Europe qui sont trop profonds pour que l'Union soit unie. Nous avons le nord qui ne cesse de se plaindre du sud, l'ouest qui fulmine contre l'est et parfois l'inverse. Tant que nous ne parviendrons pas à combler ces fossés, tant que nous ne parviendrons pas à nous présenter de nouveau plus unis, nous ne pourrons pas faire jouer toute notre force sur le terrain. Pendant notre présidence du Conseil, nous voulons donc apporter une contribution et inscrire notre action dans une démarche fédératrice. J'espère beaucoup que nous réussirons à moyen terme, même s'il existe différentes familles de partis, différents États membres, des évolutions historiques et des avis différents sur les grandes questions, à nous présenter ensemble et unifiés et à tenir face à la diversité des approches et des opinions. Car c'est seulement si cela réussit que l'Union européenne pourra faire jouer toute sa force sur le terrain.

Et le dernier point que j'aimerais évoquer: je crois qu'en plus de fondement forts et de corrections de cap là où cela est nécessaire, il nous faut surtout des décisions courageuses. Il me paraît aussi très important d'évoquer que nous n'avons actuellement pas encore d'Union européenne complète dans un sens géographique. Tant que les États des Balkans occidentaux ne feront pas partie de l'UE, l'Europe ne sera pas complète. Ces dernières années, nous avons vécu une forte lassitude face à l’élargissement, nous avons entendu des déclarations disant qu'il n'y aurait pas d’élargissement les 5 années suivantes ce qui était naturellement la constatation de faits mais en même temps a été compris dans cette région un peu comme un rejet.

Maintenant, nous assistons à un dynamisme très positif. Il n'y a pas uniquement le fait que les États des Balkans occidentaux tentent de réaliser les mesures importantes sur la voie de la réforme. Nous avons pu assister à une solution dans le litige sur le nom entre Skopje et Athènes et également à un rapprochement notable entre la Serbie et le Kosovo. Je crois qu'en tant qu'Union européenne, nous devons appuyer ce dynamisme positif en soutenant de manière positive toutes les solutions réalisées et ne pas les empêcher en nous mêlant des affaires de ceux qui se mettent d'accord sur le règlement des litiges sur place mais les conforter du mieux que nous pouvons dans ce projet et faire aussi des efforts pour qu'ils aient le soutien de leur population. Si nous parvenons à utiliser l'élan qui existe actuellement dans les Balkans occidentaux, alors nous pourrons parvenir à ce que la perspective européenne devienne dans ces pays une réalité européenne. Et je crois que cette décision courageuse sera importante si nous voulons que les États aillent dans le sens de l'intégration et non de l'isolation et si nous voulons surtout qu'ils se développent dans un sens européen et pas dans d'autres directions. Toutefois, prendre des décisions courageuses veut dire aussi prendre des décisions courageuses quand il s'agit de déterminer où va l'argent. Nous voyons actuellement quelques régions de ce monde non seulement nous rattraper mais aussi certaines nous dépasser. Singapour par exemple était un pays en voie de développement il y a 40 ans et entretemps, a dépassé de nombreux pays européens en termes de prospérité. Israël est un pays à peu près aussi grand que l'Autriche qui présente des investissements dans des start-ups à la mesure de ceux de l'Allemagne, un pays quasiment dix fois plus grand. Et lorsqu'on observe les grands groupes de l'Internet et les entreprises en croissance, on remarque rapidement que presque tous viennent des États-Unis ou de l'Asie et quasiment aucun de l'Union européenne.

En tant que gouvernement fédéral, nous nous efforçons par conséquent d'augmenter les investissements dans l'enseignement. Nous investissons plus dans les crèches qu'avant et avons réalisé une nette avancée dans le domaine du financement des universités avec la réforme du financement des universités. L'Union européenne a aussi besoin de quelque chose de semblable. Ce n'est que si nous investissons dans l'innovation, l'enseignement, la recherche et le développement et que nous investissons avec courage que nous resterons compétitifs et que nous pourrons maintenir la prospérité qui a été bâtie de même que les régimes sociaux.

Je crois que si nous réalisons ces efforts ensemble, nous réussirons à développer chaque jour un peu mieux l'Union européenne même dans des temps marqués par de grands défis. Si nous y parvenons, je crois que nous pourrons garantir ensemble que l'Union européenne n'est pas seulement l'acteur global fort du XXe siècle mais qu'elle le sera aussi au XXIe siècle.

Merci beaucoup!

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